J'écoute la radio,
comme chaque matin en me réveillant
j’ingurgite machinalement le bilan désastreux des actualités...
Je mastique les informations,
comme on triture longuement
dans sa bouche
un aliment un peu trop dur,
comme lorsqu’on tombe sur un os,
qu’il faut mâcher longtemps, patiemment, avant de l’avaler,
sachant par habitude
que tout finira par passer...
Je mange à quelques étages
du seuil de pauvreté,
sans trop songer à l’indigence...
Je tiens mes maigres comptes,
à quelques minutes seulement
des coffres de la plus grande
banque de France...
Je respire la pollution...
Le chômage m’occupe l’esprit...
L’ennui me rémunère...
L’indifférence m’indiffère...
Je sors faire un tour,
aux heures d’affluence,
Me mêler à la foule,
Et savoure un long bain
à la température ambiante,
je fais résolument
mes pieuses ablutions...
Je devrais me méfier :
Il est peu recommandé
de se baigner le ventre plein...
À l'arrière du métro,
Des ouvriers en blouse bleue
distribuent à la ronde
des promesses de bonheur en carton.
"Attention Messieurs Dames !
Il n’y en aura pas pour tout le monde dépêchez-vous !"
Des corps se crispent...
Des mains se tendent...
Tenter ma chance ?
On ne sait jamais...
J'écoute, je lis, autour,
des slogans, des affiches
Je me laisse pénétrer
de sujets et de mots
que d'autres ont décidé pour moi...
Je les sens canaliser mon esprit
M'entraîner vers des nœuds
que j'aurais à démêler plus tard...
Là un journal abandonné
Je le laisse là
Pas touche ! Couché !
Un jour, ne plus rien ouvrir
Ne rien saisir
des propositions alentour
Qui vous font les yeux doux
Pour mieux filtrer
et cheminer en vous...
Quelqu'un me marche sur le pied
Quelle heure est-il ?
Ai-je mes clés ?
Surtout ne pas louper mon arrêt
Je sors, ballotté et repu,
en proie à la marée humaine...
J'emprunte le premier escalier
Aujourd'hui c'est le 13 juillet
Demain sera un jour ferrié...
J'égraine comme un flot de pensées
Vivement qu'un peu de paix m'atteigne
Il est grand temps pour moi de vivre
Christophe Gonnet